Duel de Dames, ou quand George rencontre Sarah !
Alors que la tempête fait rage un étrange voyageur se présente à Port Blanc, petit port breton. Lucien, un jeune marin de 17 ans sert de valet et d’homme à tout faire. Le voyageur est une femme qui porte un nom d’homme, George Sand. Cela n’évoque rien à Lucien. Il sait que la locataire de Port Blanc est une comédienne célèbre Sarah Bernhardt. Cette dernière refuse tout net de recevoir l’écrivain. George Sand insiste, cette rencontre est cruciale pour elle. En févier 1870, l’étoile de la bonne Dame de Nohant a bien pâli. Elle n’arrive pas à faire jouer sa dernière pièce, elle ne peut plus écrire pour le Figaro, ses dettes deviennent présentes. Elle joue son va-tout en proposant sa pièce à la grande Sarah. L’une est au firmament, l’autre au crépuscule de sa vie. La grande Sarah ne va pas se laisser convaincre comme cela, on sent un contentieux entre les deux femmes. Et puis Sarah sait que l’on ne vient pas par hasard à Port Blanc.
Thierry Lassalle s’est inspiré pour cetyte pièce d’une note dans le journal de George Sand qui relate son expédition dans le petit port breton. Il a orchestré cette rencontre comme un duel à lames nues. Ces deux femmes ont marqué le siècle par leur prise de position, leur liberté, et leur combat contre une société qui enferme dans un carcan les femmes. Le dialogue est savoureux, les deux femmes sont intelligentes, vives et savent manier le paradoxe avec maestria. C’est un véritable duel où tous les coups sont permis. La première passe d’arme semble avoir mis George Sand KO mais elle a des ressources et des arguments qui ne devraient pas laisser la diva des scènes parisiennes insensible.
Marie Christine Barrault était tout indiquée pour ce rôle. Entre George Sand et elle c’est un compagnonnage de longue date. La grande comédienne fut une alliée tant pour l’auteur que pour le metteur en scène Olivier Macé. Connaissant parfaitement l’œuvre elle a pu conseiller l’équipe. Le résultat est là. Marie Christine Barrault est une George Sand toute en force contenue, une belle maturité avec des élans de passions, elle est grandiose. Christelle Reboul interprète Sarah Bernhardt avec fougue, un humour piquant. Sarah est jeune, célèbre, amoureuse, et veut régler ses comptes. Cristelle Reboul est une comédienne au registre multiple, elle est étincelante.
Olivier Macé a su diriger de main de maître ses deux monstres sacrés. En confiant le décor à Olivier Prost, il permet aux spectateurs de se trouver dans l’intimité de ces grandes dames. Accessoires et meubles nous plongent en 1870 pour assister à ce savoureux duel. Le spectacle reçoit des applaudissements digne de ces monstres sacrés.
Marie Laure Atinault, envoyée spéciale en Avignon