Marie Laure Atinault

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La cuisine est devenue hautement télégénique. Les émissions avec des chefs, des apprentis, des amateurs éclairés ou pas. La gastronomie est un miroir aux alouettes. Beaucoup d’appelés mais peu d’élus. L’apprentissage est dur.

Screenshot

 

Maxime et Emile se heurtent en préparant le CAP de cuisine. L’ambiance est militaire. Ils sont aux antipodes l’un de l’autre. Tout les sépare, le milieu social, le physique, les motivations, le fils d’un grand chef (Emile) et le petit de banlieue (Maxime) qui trouve une issue dans la cuisine. Le choc des cultures. Un grand timide et un petit taureau. Mais la sauce prend entre eux. Leur amitié les aide à supporter les bizutages parfois cruels, la soupe à la grimace. La route vers les étoiles est semée d’embûches. Les deux amis vont travailler dans des pizzerias miteuses, des routiers pas forcément sympas et enfin un restaurant étoilé. Le Graal peut-être ? Les deux amis partagent leur passion. La vie est un grand gâteau et ils vont en faire une bouchée. Jusqu’au moment où l’un des deux sera plus gourmand.

Clément Marchand a écrit ce récit sensible, plein d’amour et de rage. Il a fait cette expérience et a compris qu’il risquait de s’y perdre.

 

Il fallait une mise en scène souple et rapide, car il y a une multitude de lieux, de situations et de personnages. La scénographie est simple, mobile, l’espace se construit et change avec des modules que les comédiens déplacent comme les architectes de leur histoire. Jean-Baptiste Guinchard et Guillaume Tognati sont toujours présents sur scène, toujours en plein coup de feu. Clément Marchand a mis tous les talents de son côté, la chorégraphe Delphine Jungman a réglé les déplacements des cuistots pour créer un pas de deux. Musique, lumières tout concours à un spectacle à la fois drôle, grave, plein de tendresse, pour dépeindre cette amitié virile. On passe des saveurs exquises à l’amertume de la rancœur. Ce beau texte est servi par deux comédiens formidables.

Un spectacle 3 étoiles.

Marie Laure Atinault

Festival Off Avignon 2024

Théâtre des Corps Saints à 18h05

photos : @François Fonty

Rentrée 42, Bienvenue les enfants de Xavier Lemaire et Pierre-Olivier Scotto au Festival Off Avignon

La directrice de l’école retrouve avec joie la salle de classe. Sur le tableau noir, elle efface bonnes vacances, Au revoir les enfants pour inscrire 1er Octobre 1942, c’est la veille de la rentrée des classes. Mais elle sait que Madame Meyer, l’une des institutrices ne sera pas sur l’estrade pour dispenser son savoir.

Le débonnaire concierge, un ancien de Verdun, amputé d’un bras, est débordant de bonne volonté. Il règne sur les fournitures, dans cette France occupée où tout est sujet à tickets de rationnement, il faut faire attention aux cahiers, à la craie, à l’encre. Un seul cahier par élève, fini les lignes de punition ! La directrice attend les listes des enfants inscrits. Il faut bien préparer la répartition des élèves.

Les institutrices arrivent une à une. La plus jeune est heureuse de retrouver l’école et de se rendre utile. Sportive, enjouée, elle vient d’un milieu aisé. Elle met tout son espoir dans le Maréchal Pétain, le vainqueur de 14-18, le sauveur de la France. La directrice ne partage pas son enthousiasme. Elle doit affronter le déterminisme et l’intransigeance d’une institutrice, communiste convaincue et qui veut combattre. La troisième est une femme généreuse, qui déteste les conflits et qui n’hésite pas à partager ses précieuses provisions dans ces temps de privation. Les listes arrivent enfin. Les pupitres et les bancs installés tout est prêt pour demain, pour accueillir les élèves.

La cloche a retenti, mais il y a à peine une vingtaine d’élèves. Où sont les écolières ? Les institutrices les connaissent. Dans les autres écoles le constat est le même, les effectifs ne sont pas complets loin de là. La terrible vérité les atteint en plein cœur. En juillet la rafle du Vel d’hiv a vidé les immeubles du quartier. Des familles entières ont disparu. Lorsque les institutrices font l’appel, les manquantes ont des noms à consonance étrangère. Leurs petites élèves juives ne jouent plus à la marelle dans la cour.

L’horreur et le désespoir accablent ces femmes. La directrice décide de réagir, puisque personne ne répond au téléphone, ni la mairie, ni les responsables de l’enseignement. Elle décide d’organiser les cours et d’adapter aux circonstances une pédagogie innovante. Un inspecteur d’Académie arrive, quinze jours plus tard. Elles sont conscientes que le nombre restreint des élèves peut mettre en péril leur école. Mais finalement rien n’est écrit, et la résistance est en route ….

Rarement le sujet grave de ces enfants raflés avait été traité. Le titre Au revoir les enfants fait référence au formidable film de Louis Malle. La pièce est à la fois grave, émouvante et drôle. Elle est surtout indispensable. L’évocation des noms des élèves absentes nous prend à la gorge. Ne les oublions pas, refusons que des sauvages inaptes barbouillent leurs noms sur les monuments.

Le soin apporté au décor et aux costumes nous propulse dans cette époque. Les comédiens sont tous digne d’éloge de Dominique Thomas, le concierge à la tendre Fanny Lucet. Anne Richard est une directrice sobre, digne. Emilie Chevrillon donne sa force à la communiste intransigeante. Michel Laliberté est l’homme que nous détestons tous en interprétant cet inspecteur obtus. Quand à Isabelle Andréani, elle restera dans toute les mémoires comme la « meurtrière aux pralines ». Généreuse et tourbillonnante. Ce spectacle est à voir et à revoir. Du théâtre qui fait réfléchir, qui émeut. Du vrai, du grand théâtre.

Marie Laure Atinault

 

Mise en scène Xavier Lemaire, avec Anne Richard, Isabelle Andréani, Emilie Chevrillon, Fanny Lucet, Dominique Thomas, Michel Laliberté

Festival Off Avignon        Théâtre de la Luna à 16h50, tél : 04 12 29 01 24

la bande annonce :

 

Un classique, une fois encore revisité pour le plus grand plaisir des spectateurs.

Bastien Follavoine est porcelainier. Il joue gros ce matin, il va présenter son nouveau produit phare, un pot de chambre en porcelaine incassable à Monsieur Chouilloux et avoir le marché colossal de l’armée française. Mais son bureau va devenir l’épicentre d’un drame domestique. Alors qu’en bon père de famille, il tente d’aider son fils en cherchant dans le dictionnaire où se situe les Iles « zébrides », son épouse Julie fait irruption, en peignoir, un seau de toilettes à la main, lui annonce une nouvelle terrible concernant leur fils Hervé mais que tout le monde nomme Bébé. Nous vous laissons découvrir les affres maternelles, les angoisses d’un industriel patriote, l’exaspération d’un mari. Décidemment cette matinée se présente bien mal ! Une véritable descente aux enfers à laquelle un public sadique, dont nous faisons parti prend un vif plaisir.

Antoine Séguin, metteur en scène et comédien, a décidé de monter ce vaudeville de Feydeau, crée en 1910. Le texte de Feydeau est ancré dans son temps, le pot de chambre est désormais une antiquité, le seau de toilette a fait heureusement place à la salle de bains, et l’huile de foie de morue est passée de mode. Antoine Séguin a situé la pièce dans les années cinquante, changeant çà et là un peu le texte, mais c’est bien fait et bien venu. Le Vaudeville est un genre qui ne supporte pas la médiocrité. Tout est dans le rythme, il faut que les scènes s’enchainent, que les quiproquos soient percutants. Les comédiens sont soumis à une cadence folle. Feydeau est un auteur de troupe, pour le jouer il faut une grande complicité, une cohésion du rire. Ici le contrat est plus que largement rempli. La troupe réunie autour d’Antoine Séguin qui joue le pauvre Follavoine que nous plaignons d’avoir une épouse insupportable et quelle joie de revoir Elrick Thomas qui jubile dans le rôle d’une vieille baderne, le reste de la distribution est excellente. Vive Feydeau.

Marie Laure Atinault

On purge Bébé

De Georges Feydeau, mise en scène Antoine Séguin,

Avec Amélie Gonin, Sophie Gourdin, Gwénaël Ravaux, Antoine Séguin, Elrick Thomas

Festival OFF Avignon,

L’Ancien Carmel,

3, rue de l’Observance à 21h

 

Sophie déballe sa valise de famille, du linge fin brodé aux points de l’amour.

Sophie Forte hérite d’une vieille valise. Lorsqu’elle l’ouvre, elle découvre des photos des membres de sa famille. Entre clichés connus et inconnus, elle reconstitue l’histoire de sa famille. Une famille haute en couleurs. Que de trésors recèlent ces photos jaunies. D’abord elle nous présente ses parents, le beau gosse, là sur la photo, c’est son papa. Max joue de l’accordéon, et il « emballe » la maman de Sophie, qui arrivera plus de 10 ans après le mariage. Son père dépose le piano à bretelles et devient chauffeur de taxi. Il a le sang un peu chaud, et il se retrouve au chômage, trainant en pyjama sur le canapé. Ce qui énerve sa femme, pétulante et enthousiaste. Elle sait que son mari a un don pour le dessin. Les pastels et les crayons de la petite Sophie vont changer son destin. Si elle est fille unique, Sophie à une famille picaresque. Sa tante qui a une drôle de voix, elle est toujours impeccable avec des coiffures bien laquées, flanqué par son petit chien Gerry. Gerry est immortel.  Son oncle est un personnage de dessin animé par son physique atypique, un cœur gros comme ça.

Ajoutez à cela un ancêtre napolitain, un peu inquiétant, des grands parents étonnants. Sophie grandit à Lyon. Son père grâce à l’obstination joyeuse de sa mère est exposé dans des galeries, il reçoit des prix. Son épouse décide de transformer son magasin de robes de mariées en galerie. Max est un peu un ours timide, doté d’une véritable modestie. Il hausse ses larges épaules, mais le succès est là.

Sophie découvre Paris avec gourmandise, son papa peintre est invité pour recevoir un prix. Sa mère décide qu’il faut faire ce voyage…

Quel beau voyage nous faisons avec Sophie et sa valise magique.

Entre boîte de Pandore et malle de pirate, nous feuilletons ce roman de famille. Sophie Forte campe tous les personnages avec drôlerie et tendresse. Le roman éponyme nous avait enthousiasmé, le spectacle répond à nos attentes. Qu’il est agréable d’avoir un récit positif, plein d’amour et d’humour. Cette valise est une cargaison de tendresse.

A voir absolument.

Marie Laure Atinault

La Valise

De Sophie Forte d’après son roman éponyme (2022)

Mise en scène de l’auteur et Frédéric Patto

Festival Off Avignon à l’Ancien Carmel,
3, rue de l’Observance
Jusqu’au 21 juillet à 13h
Création Mois Molière 2024

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Le mois Molière à Versailles :    Un, deux, trois, Vive le théâtre !

Depuis vingt-huit ans, le mois Molière à Versailles est devenu un rendez-vous incontournable des amoureux du théâtre, qu’ils soient versaillais ou de la région, tant les propositions sont alléchantes. Des créations, des reprises sont suivis par un public nombreux et familial. Les tarifs sont très bas ou offrent des prix accessibles défiant toute concurrence. François de Maziéres, le maire de Versailles est le créateur de ce festival. Il ne ménage pas ses efforts. Son vélo est célèbre, car il se rend de lieux en lieux attentif à tout et à tous. Il faut saluer l’équipe de bénévoles qui ne compte pas leurs efforts. De nombreuses troupes sont en résidence, des troupes de théâtre amateur présentent leur spectacle. Un air de fête envahit toute la ville du Roi Soleil qui aimait tant le théâtre et protégeait notre grand Molière.
Le mois Molière est,  pendant trente jours,  le tremplin de 330 spectacles joués dans 62 lieux et accueille plus de 150.000 spectateurs .

Dans la programmation cette année, le patron du théâtre français, le grand Molière est mis à l’honneur entre autres  avec l’excellent spectacle de Nicolas Rigas, qui mêle avec un art consommé théâtre et chant d’opéra, Le médecin malgré lui, délicieusement mis en musique par Charles Gounod, Le Bourgeois Gentilhomme mis en scène par Bastien Ossart. On retrouve avec plaisir des « sociétaires » du mois Molière, Ronan Rivière revient avec son génial Revizor de Gogol, et présente également Le Journal d’un Fou du même Gogol. Antoine Seguin présente sa formidable trilogie de Pagnol à voir et à revoir et, nous offre une version de On purge Bébé de Feydeau, qui soulève des houles de rire. Notre cher Feydeau dans la mise en scène hilarante et tonique d’Anthony Magnier, dans Un Fil à la patte, qui est devenu un classique du mois Molière. Nicolas Rigas et sa troupe présentent, non seulement Le médecin malgré lui, mais également Une soirée chez Offenbach créée l’an passé et qui sera donné pour la première fois avec orchestre, et le même Nicolas Rigas met en scène Le Géniteur d’un jeune auteur dont nous parlerons plus loin.

 

Cette année le théâtre contemporain est présent, et cette nouveauté est bien accueilli par un public toujours aussi curieux, aussi présent. Un partenaire de choix pour beaucoup de festival est le temps. Le dimanche 2 juin, nous dansions tous une danse de la joie, point de pluie annoncée et même un soleil discret mais présent car l’un des lieux emblématiques est la cour de la Grande Ecurie, qui est un peu la Cour d’honneur pour le mois Molière. Mais en début d’après-midi rendez-vous au superbe théâtre Montansier, Denis Podalydès, le local de l’étape, devant une salle comble nous livre ses souvenirs d’enfant versaillais et son amour de Molière, au travers d’extrait de son livre En jouant, en écrivant, un joli moment de théâtre.
Nous découvrons la nouvelle pièce de Gilles Dyrek, Je m’appelle Georges, mise en scène par son complice Éric Bu. L’idée de départ est à la fois simple et ingénieuse, nous sommes conditionnés par notre prénom, il nous situe dans le temps, les noms composés marquent les années 50 / 60, les Elodie les années 80. En 2024, les Georges ne sont pas des perdreaux de l’année, mais notre Georges est sacrément séduisant. Alors qu’il emménage dans un nouvel immeuble, il se rend compte que toutes les résidences autour de lui portent le prénom de l’une de ses ex ? Quel est ce signe du destin ? Drôle, inventif, emporté par une distribution dynamique et talentueuse, Georges remporte tous les suffrages.

Je m’appelle Georges

Je m’appelle Georges

Je m’appelle Georges

Nous quittons la Cour des Grande Ecuries pour nous rendre au Conservatoire à rayonnement régional pour découvrir la création de la pièce Le Géniteur d’un jeune auteur François de Maziéres. Une voix enveloppante nous convie à nous asseoir ensemble. Pierre (Martin Loizillon) et Victoire (Mylène Bourbeau) veulent avoir un enfant. Ils sont jeunes, bien portants mais pour l’instant, leurs tentatives sont infructueuses, insidieusement chacun porte la responsabilité sur l’autre. Mais voilà, d’où vient la faute exactement ? Et puis d’abord qui était leur père, leur géniteur. Pierre fait des recherches et trouve son père biologique. Roger arrive chez le couple, mais il n’est pas très glamour…On rit beaucoup. Cette comédie qui expose avec humour un fait de société grave est joué avec finesse par un trio de comédiens des plus talentueux. Nicolas Rigas assure une mise en scène vive, soulignant chaque personnage avec pertinence.

Le géniteur

Nous continuons notre parcours dans le programme du mois Molière.
Au Potager du Roi, la Tempête de Shakespeare dans la mise en scène follement inventive de Stéphanie Tesson. A noter, les créations car nous ne l’avons pas assez souligné le mois Molière permet la création de beaucoup de spectacles dont certains réjouiront les festivaliers d’Avignon, de La Valise de Sophie Forte au Paris-Istanbul, Dernier Appel le dernier spectacle signé Éric Bouvron et du même Bouvron Johnny, Libre dans ma tête, avec Didier Gustin.
La musique est présente par des concerts dans les églises, à l’Hôtel de ville.
Ah quel beau festival que voilà !
Si vous allez au Festival Off d’Avignon vous pourrez retrouver certains spectacles dans un nouveau lieu l’Ancien Carmel et voir ceux que vous aurez raté.

 

Marie Laure Atinault

Le mois Molière à Versailles juin 2024
www.moismoliere.com renseignements : 01 30 21 51 39
Le mois Molière à l’Ancien Carmel d’Avignon du 3 au 21 juillet
www.moismoliere.com/avignon

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Alexandre le Grand est un personnage historique et mythique, le texte poétique de Laurent Gaudé nous permet d’applaudir un comédien exceptionnel : Emmanuel Schwartz

La chambre est blanche. Du sol au plafond, tout est Blanc. Le lit qui est au centre de cette pièce, est recouvert de draps immaculés et froissés. Un homme nous parle d’une voix caverneuse. Il est emmailloté dans un drap, ou est-ce un linceul ? Il sait que la fin est proche. Injustice des Dieux. Pourquoi briser un destin hors norme. Nous sommes à Babylone, le 11 juin de l’an 323 avant Jésus Christ. Alexandre le Grand va mourir. Il se livre à nous, témoin muet et fasciné par ce monologue hypnotique. Alexandre, le fils de Philippe II, roi de macédoine et d’Olympias. L’un de ses précepteurs était Aristote. Ce prince cultivé est rompu aux arts de la guerre. Lorsque son père est assassiné il devient le roi de Macédoine, aidé par sa mère, ils vont tuer tous ceux qui pourraient arrêter l’ascension de ce Prince beau et courageux. Il quitte le drap, et s’avance vers nous pour nous compter son épopée hors du commun. Rien ne lui résiste même les troupes de Darius qu’il bat au Granique, à Issos. De l’Egypte où il devient Pharaon, il passe l’Euphrate. Il conduit ses troupes de victoire en victoire, jusqu’à l’Indus, il abolit les frontières de l’inconnu. Au bord de L’Euphrate, il rencontre un magnifique et étonnant Tigre Bleu. Cet animal fantastique lui montre le chemin vers d’autres conquêtes. Quand reviendra-t-il lui montrer la bonne voie?

 

Alexandre le conquérant, le guerrier, le presque Dieu, meurt. Il le sait. Il se confie sans rien omettre, ni son génie militaire, ni son incroyable cruauté. Non, il n’a pas peur de la mort. Il l’attend pour cette dernière bataille, pour ce corps à corps avec Hadès. Quel est le Graal d’Alexandre ? Aller toujours plus loin, repousser toutes les limites au risque de se perdre. Quel rôle extraordinaire pour un comédien prodigieux, Emmanuel Schwartz nous fascine littéralement. Les murs deviennent parfois écran avec des projections entre autre la charge des éléphants mais nous ne regardons pas toujours car nous sommes captivés, happés par le jeu du comédien. Il n’y a pas que la voix mais tout son corps qui joue. Ses mains, ses pieds se tordent pour devenir les puissantes pates du tigre fabuleux. De l’articulation d’un malade perclus de fièvre, à celle royale de celui qui commande. Il invoque ses fantômes, les esprits de ses ennemis et de ses amis, de sa vie si courte, si pleine, si extraordinaire. Denis Marleau est un remarquable directeur d’acteur, ses mises en scène sont toujours ciselées. La rencontre d’un auteur, d’un comédien et d’un metteur en scène offre un spectacle inoubliable.

 

Texte de Laurent Gaudé

Mise en scène Denis Marleau

Avec Emmanuel Schwartz

équipe artistique

texte Laurent Gaudé
mise en scène Denis Marleau
avec Emmanuel Schwartz
collaboration artistique et conception vidéo Stéphanie Jasmin
scénographie Stéphanie Jasmin et Denis Marleau assistés de Stéphane Longpré
lumières Marc Parent
musique Philippe Brault
costumes Linda Brunelle
maquillages et coiffures Angelo Barsetti
design sonore Julien Eclancher
coordination et montage vidéo Pierre Laniel
assistanat à la mise en scène Carol-Anne Bourgon Sicard

les mardis soirs à 19.00,

du mercredi au samedi à 20.00,  samedi 15 juin à 18.00 uniquement, dimanche 9 juin 15.30 et dimanche 16 juin à 14.30.

toutes les photos : © Yanick Macdonald

réservations : https://www.colline.fr/spectacles/le-tigre-bleu-de-leuphrate

Marie Laure Atinault

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Louis Langrée, le directeur de l’Opéra-Comique a eu l’excellente idée de programmer Stravinsky et Ravel, les deux compositeurs qui se sont rencontrés grâce à Diaghilev, s’appréciaient et s’admiraient.

Il dirige l’orchestre des Champs Elysées avec cette bienveillance qui est son apanage.

La soirée débute avec Pulcinella, un ballet avec chant en un Acte. Stravinsky s’est inspiré de Pergolèse, crée à l’opéra de Paris le 15 Mai 1920, suivi après l’entracte de L’Heure Espagnole, comédie Musicale en un Acte sur un livret polisson de Franc-Nohain, créée à l’Opéra-comique le 19 Mai 1911.

Guillaume Galliene a choisi un décor unique de Sylvie Olivé mais à escaliers modulables. Le décor est une sorte de tour de Babel de l’amour et s’apparente à l’univers d’ Escher. Pas de référence à la commedia dell’arte dont Pulcinella/Polichinelle est l’un des personnages. Notre héros (Oscar Salomonsson), bien que fiancé à une belle et pure jeune fille (Alice Renavand) aime baguenauder dans les rues. Les filles sont sensibles à son allure décontractée. Mais attention aux gaillards musclés et à la jalousie de sa fiancée. Pulcinella porte un complet et un chapeau melon, pas de costume bariolé. Il semble être un poète des rues entre Charlot ou l’amoureux de Peynet. La chorégraphie de Clairemarie Osta, et les chants façon Pergolèse (1710-1736) ne parviennent à nous sortir, il faut bien l’avouer d’un certain ennui.

L’Heure Espagnole nous plonge dans une Espagne d’opérette ou plutôt selon l’expression de Ravel de Comédie Musicale. L’horloger Torquemada (Philippe Talbot), qui n’a aucun rapport avec le terrible inquisiteur, a pour charge de remonter toutes les horloges publiques de Tolède. Le jeudi soir est très attendu par son épouse Concepción (Stéphanie d’Oustrac). Elle attend son amant, un jeune poète (Benoît Rameau). A l’heure du départ, ô combien attendu, Ramiro le muletier (Jean-Sébastien Bou) vient demander une réparation, l’horloger pointilleux sur l’horaire de remontage des pendules de la ville demande au muletier de l’attendre dans sa boutique. Cela ne fait pas l’affaire de Concepción. Tout va se liguer pour forcer à la fidélité l’épouse insatisfaite, le poète est un peu mou, Ramiro est très présent et très serviable puisque notre belle horlogère va lui demander de déménager une pendule à l’étage. Ramiro s’exécute. Comble de malheur le banquier Don Inigo Gomez (Nicolas Cavallier) arrive pour tenter de séduire la belle!

L’escalier est le théâtre de pérégrination du muletier déménageur, des cachettes des amants. Qu’il est donc difficile d’être infidèle à Tolède et ces hommes se prétendent espagnols ! Le texte du délicieux Franc-Nohain fit dresser les cheveux sur la tête de certain pudibond, gaulois sans vulgarité, offrant de jolies répliques. Don Inigo Gomez est truculent à souhait, Nicolas Cavallier offre des graves profonds à ce barbon. Benoît Rameau, le poète et amant peu empressé a les élans lyriques de l’inspiration. Philippe Talbot, notre horloger est toujours parfaitement juste.  Jean-Sébastien Bou compose un muletier qui fera date. Ses qualités de chanteur exceptionnel se doublent de celles d’un comédien inspiré. Ravel a dû regarder dans sa boule de cristal pour composer ce rôle pour lui. Stéphanie d’Oustrac est d’une coquinerie absolue. La fraîcheur de son jeu, son timbre chaud et l’étendue de son registre nous ravissent toujours. Néanmoins nous tenons à signaler que Jean-Sébastien Bou, n’est pas libre ces prochains mois pour tout déménagement !

Cette Heure Espagnole est une heure éblouissante !

ML Atinault

 

Toutes les photos : @ S BRION

Next est un festival de théâtre, de danse et de performance, un rendez-vous incontournable, qui met en ébullition artistique les Hauts de France.

photo Grégoire Verbeke

Cette 16ème édition était particulièrement réussie, alliant les prestations d’artistes confirmés et de troupes émergentes. Du 9 novembre au 2 décembre, 36 spectacles ont été présentés dans les différents lieux partenaires :

Le Next rassemble 16 villes belges et françaises de l’Eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai. Ce festival fédère le Phénix et l’Espace Pasolini à Valenciennes, La Rose des vents à Villeneuve d’Ascq entre autres. Le Next est attentif aux défis écologiques. Quel est l’avenir du spectacle vivant dans le nouveau régime climatique ? L’équipe du Next ne se contente pas de poser des questions, ils sont cohérents dans leurs actes. Le public est considéré comme un partenaire, un véritable accueil, des navettes gratuites, des parcours « vertueux » sont organisés pour voir plusieurs spectacles le même jour, des services de restauration que ce soit au Phénix, le paquebot rouge de Valenciennes, scène nationale dirigée avec beaucoup de tac par Romaric Daurier, ou au Buda en Belgique avec ses délicieux plats végétariens. Tout est organisé afin que les spectateurs profitent pleinement du Festival. Le Next a commencé avec l’excellent spectacle de danse Foreshadow not standing d’Alexander Vantourhout. Au fond de la scène un mur de 6 mètre. Les danseurs vont s’attaquer à une escalade, certain devenant le marchepied des autres. Les corps sont tordus, étirés, presque déconstruit. Ils se reniflent, se confrontent, s’étirent, se hissent. L’équilibre en péril. Etonnant et fascinant.

photo Loizenbauer

Mirlitons de Aymeric Hainaux et François Chaignaud, est un duo singulier entre le corps et le son. Le premier est un spécialiste de l’Human Beat Box, avec un micro il crée des sons des rythmes avec sa bouche, se servant de son corps comme caisse de résonnance. Le praticable est un cercle de bois exigu. Un corps est allongé, le danseur François Chaignaud s’en empare le hisse contre lui. Que veut-il faire de ce corps inerte qui porte un haubert doré. L’homme prend un bâton orné d’une multitude de clochettes et avec un micro collé à la bouche, crée une musique cadencée. Le danseur porte des chaussures de Flamenco, et tape la petite arène en bois si fort que l’on craint qu’il la traverse. Le public est très proche, installé en arc de cercle. Nous sommes comme conviés à un rite initiatique. Chaignaud se hisse sur la pointe, joue de l’équilibre jusqu’au point de chute en l’évitant tel un elfe. Eblouissant !

Photo Jonas Verbeke

Deep Cuts de Bryan Campbell

Alors qu’il se promenait en forêt, Bryan frappe un arbre avec une branche. Qu’a ressenti l’arbre. De ce questionnement sylvestre est né ce spectacle qui est une performance alliant opéra et bûcheronnage. Au début, Bryan, très bricoleur découpe des planches et installe un lutrin sur lequel il dépose une partition. Entre découpe de planches, creusement de bûche et danse, Deep Cuts amuse ou énerve. Cette pastorale du XXIème siècle ne manque pas de charme.

Au programme au Phénix Extinction de Julien Gosselin, triptyque de 5H, se concluant par le texte de Thomas Bernard, superbement interprété.

Le festival Next est une proposition passionnante, animé par une équipe motivée prête à soulever des montagnes. Vivement la prochaine édition !!

M.L Atinault

www.Nextfestival.eu

Photo : LVS

Photo Bart Grietens

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Don Pasquale est un opéra de Gaetano Donizetti (1797-1848)

DON PASQUALE –

Opéra drame Buffo en 3 actes
Livret Giovanni Ruffini, Gaetano Donizetti
Pour cette série de représentations la direction musicale  est de Speranza Scappucci dans une mise en scène Damiano Michieletto

DON PASQUALE –

DON PASQUALE –

Tonique, allègre et drôle !!!!!
Pauvre Don Pasquale, quel diable l’a inspiré pour se marier !Don Pasquale est un vieux barbon, il n’a pas d’enfant mais un neveu, Ernesto. Il ne veut pas que son neveu, à priori son seul héritier, épouse la femme qu’il aime. Norina est une jeune veuve sans le sou. Il lui propose un beau parti, mais Ernesto le refuse.= Don Pasquale ouvre son cœur serré d’avare, qu’il souhaite se marier, à son ami Malatesta. Cet ami est un fourbe. Il flaire la bonne affaire et propose comme fiancée Sofrina, sa sœur, un ange de douceur.

DON PASQUALE –

DON PASQUALE –

DON PASQUALE –

Le barbon amoureux met à la porte le pauvre Ernesto, puisque ce dernier refuse le bon parti qu’il lui propose. Le pauvre jeune homme rompt avec Norina car il ne peut décemment l’épouser. Norina au comble du désespoir reçoit Malatesta, un vrai Machiavel qui lui propose de jouer le rôle de sa sœur, elle sera mariée devant un faux notaire et la douce sœur deviendra une véritable harpie afin de dégouter du mariage Don Pascale. Quiproquos, travestissement, mascarade et stratagème tout est réuni pour une comédie sans aucun temps mort.

DON PASQUALE –

DON PASQUALE –

Damiano Michieletto est un metteur en scène heureux, son Barbier de Séville de Rossini est l’un des spectacles qui de* reprise en reprise réjouit des salles enthousiastes. Il a placé l’action dans une Italie des années cinquante/soixante. L’utilisation de la vidéo souvent galvaudée est ici porteuse de sens, et donne des scènes de comédie. Don Pasquale est  une comédie rondement menée, sous forme opéra,  l’intrigue étant inspirée d’un canevas de Commedia dell’arte, reprend les personnages du genre : barbon, coquette et docteur, en l’occurrence Malatesta. Au fur et à mesure que la jeune mariée devient insupportable et exigeante, le décor s’anime, change. Adieu vieux mobilier, vive la nouveauté.

DON PASQUALE –

La partition de Donizetti offre aux chanteurs une jolie palette de nuance. De la frénésie de l’ouverture aux superbes mélodies tantôt mélancoliques, tantôt vives et espiègles. C’est une musique limpide, avec des emballements. Le rythme effréné communique une verve contagieuse. Gaetano Donizetti a prétendu l’avoir écrit en 11 jours, au vu de la partition entre autre l’air d’Ernesto si joliment écrit. Le rythme endiablé, le charme des mélodies et l’orchestration raffinée font de cet opéra un pur moment de bonheur.

La distribution est parfaite Laurent Naouri (Baryton) est comme le bon vin, il se bonifie d’opéra en opéra. De surcroit, c’est un excellent comédien. En un mot comme en cent, nous l’adorons. Voilà c’est dit !
Malatesta, l’ami fourbe est joué par Florian Sempey (Baryton) est cauteleux à souhait. René Barbera, (ténor) et Ernesto, le neveu, sont impeccables, ils soutiennent cette partition entre la farce et la mélancolie. N’oublions pas le notaire : Slawomir Szychowiak. Elle est la femme dans tous ses états, coquette, mutine, espiègle, insupportable, tendre, la divine Julie Fuchs. Cette merveilleuse Soprano nous ravit.
Il faut courir voir Don Pasquale !

DON PASQUALE –
Compositeur : Gaetano Donizetti
Livret : Giovanni Ruffini et Gaetano Donizetti
Mise en scene : Damiano Michieletto
Direction musicale : Speranza Scappucci
Decors : Paolo Fantin
Lumieres : Alessandro Carletti
Chef de choeur : Alessandro Di Stefano
Avec :
Laurent Naouri (Don Paquale)
Florian Sempey (Dottor Malatesta)
Rene Barbera (Ernesto)
Julie Fuchs (Norina)
Slawomir Szychowiak (Un notaro)

 

Cet article a été écrit par Marie Laure Atinault

Toutes les photos : @ -Franck-Ferville- ONP
Opéra Garnier

Dernières représentations à 19h30: le 5, le 11 et le 13 octobre

Places de 25 à 200,00 €

extrait :

Rating:

Pauvre Offenbach, il a bien des soucis ! Un ami lui demande de s’occuper d’une mystérieuse Princesse, les répétitions de son prochain spectacle ne se passent pas comme prévu, le ténor le lâche, le directeur le lâche, l’inspiration le lâche !!!!   Il a besoin de tous les dieux de l’Olympe pour le secourir !

Lui le roi de Paris, n’est pas d’humeur à mener une Vie Parisienne trépidante. Il met son domestique Justin à contribution. La princesse arrive, elle est pompette, voire complétement grise. Tout tourne, tout virevolte dans ce spectacle follement drôle et pétillant !

On est sous le charme de ce florilège des airs du divin Offenbach:  La Belle Hélène, La Périchole, La Vie Parisienne, La Grande Duchesse de Gerolstein, et le trépidant trio du grill de « Pomme d’Api », nous enchantent, certains spectateurs brûlants du désir de chanter avec les artistes.

Le théâtre du Petit Monde est un label de qualité, La Vie Parisienne présentée en 2019 nous avait enchantée, Le Médecin malgré lui mis en musique par Gounod fut aussi une belle réussite. Cette soirée chez Offenbach ne déroge pas à la règle. Martin Loizillon a concocté un texte  prétexte pour introduire ces airs que nous adorons. Sa mise en scène mène tambour battant les protagonistes.

Les chanteurs sont excellents, Nicolas Rigas est un Offenbach tout à fait Ad hoc et sans postiche. Cet excellent Baryton est comme un bon vin car il se bonifie d’année en année, et il est de surcroit un comédien né. Christine Tocci , notre princesse champagnisée est une soprano brillante et piquante. Pierre-Antoine Chaumier, Justin le domestique amoureux de la princesse est un ténor remarquable au timbre élégant.

Marie-Christine Goueffon est non seulement la pianiste mais fait partie de ce spectacle dont le défaut est qu’il soit trop court !

Une soirée chez Offenbach est l’un des meilleurs spectacles de ce festival.

Texte et mise en scène Martin Loizillon, musique Jacques Offenbach, avec en alternance, Nicolas Rigas, Pierre-Antoine Chaumier, Christine Tocci, Marie-Christine Goueffon, Ping Zhang et Clémentine Decouture

Marie Laure Atinault

Festival Off Avignon

Théâtre des Corps Saints tous les jours à 12h10

 

la bande annonce: